April 9, 2014

MUSIC IN BELGIUM

Les Inutili sont italiens et la recherche d’informations sur leur groupe, ses membres et les marques de guitares qu’ils utilisent sont bien difficiles à trouver sur le Net. D’ici à conclure qu’Inutili est un groupe mythique, il n’y a pas loin. Et ceux qui ont l’intention d’embarquer dans leur musique doivent avant tout savoir qu’ils auront affaire ici à de l’instrumental psychédélique lourd entièrement tourné vers la recherche astrale et le voyage dans l’hypnotisme musical.

Le quatuor (Alessandro, batterie
 ; Giancarlo, basse ; Pietro, guitare et Danilo, guitare) vient de Teramo, un bled situé à une cinquantaine de kilomètres au nord de Pescara, pas loin de la côte Adriatique. Pour tromper l’ennui inhérent à ce paisible village, nos musiciens de Inutili mettent au point une musique apte à faire décoller n’importe quel pékin vers les zones les plus reculées de la galaxie, à base de rythmiques répétitives servant de base d’improvisation à une guitare toute en larsen et une batterie rustique.

C’est le mode opératoire que l’on trouve sur le premier album éponyme du groupe, sorti en 2013. Quelques morceaux plus ou moins longs permettent de découvrir le psychédélisme plutôt brut d’Inutili, qui brille avec l’énorme "Satori", morceau de treize minutes qui fait office de clou du spectacle sonore.

On reprend les mêmes méthodes avec "Music to watch the clouds on a sunny day", invitation à la contemplation sonore et au dialogue avec les astres. Inutili place ici entre nos oreilles deux morceaux affichant respectivement 19 et 20 minutes. Le premier morceau "Fry your brain" (tout un programme…) repose sur un thème de basse qui permet à la batterie et à la guitare de se livrer à toutes sortes de circonvolutions soniques et de solos tapageurs ou stridents, en mid-tempo. "Drunk of Colostro" est quant à lui plus bluesy mais possède la même capacité cosmique et le même son râpeux, avec à la fin du compte un déferlement roboratif d’infra-sons obsédants.

Le son de cet album est en effet assez particulier. Il semble que le producteur ait eu l’idée d’enregistrer le groupe au fond d’une cave avec un dictaphone. On se retrouve dans les couloirs du temps, à l’époque où des groupes krautrock allemands pratiquaient un heavy rock psychédélique dépourvu de toute finesse sonore (German Oak, Hairy Chapter ou Florian Geyer, par exemple) ou quand des groupes américains faisaient de même à la toute fin de la période psychédélique historique, en 1972-73 (Top Drawer, Sainte Anthony’s Fyre, Bolder Damn…). Ici, les sonorités crues et grasses d’Inutili seront un cauchemar pour l’amateur de rock progressif finement ciselé ou pour celui qui nettoie tous les matins sa chaîne hi-fi avec un plumeau en soie.

Le génial Julian Cope a posté un commentaire élogieux au sujet d’Inutili sur son site spécialisé en musique inaudible ou totalement décalée. C’est déjà une distinction très méritoire pour les Italiens qui ont tout le potentiel requis pour briser les tympans, élever l’âme vers la transe et jeter dans le paysage musical contemporain un OVNI sonore à la fois dément et tantrique. A réserver en priorité à ceux qui n’ont pas froid aux oreilles et dont la curiosité peut les mener à des expériences un peu folles.

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